Imavov assure, Saint Denis se relance: la soirée qui compte

Retour à Bercy pour une carte taillée pour la vitrine tricolore: cinq Français, un public incandescent et des enjeux clairs pour les classements. L’Accor Arena a vibré au rythme de UFC Paris, où la tête d’affiche Nassourdine Imavov a tenu son rang, pendant que Benoît Saint Denis rappelait à toute la catégorie des légers qu’il n’a rien perdu de son mordant. Au-delà du bruit, la soirée a livré des clés concrètes pour la suite: qui grimpe, qui se remet en selle, et quelle fenêtre pour les prochains combats.

En main event, Imavov a remporté une décision unanime contre Caio Borralho. Le Français a cadré le Brésilien avec son jab et sa gestion de la distance, grattant point après point sans s’exposer. Les chiffres racontent la même histoire: 81 frappes significatives réussies sur 162 tentées et plus d’une minute de contrôle sur cinq rounds. Rien de clinquant, mais diablement propre. Surtout, il a fermé la porte aux moments chauds en gérant les transitions, signe d’un combattant qui a appris à gagner les rounds avant de chercher le coup parfait.

Techniquement, Imavov a imposé son rythme: pieds légers, variations d’angles, feintes pour faire mordre Borralho, puis remise sèche derrière. Quand le Brésilien a tenté de casser la distance pour enclencher le grappling, le Français a répondu par une défense de projections disciplinée et des décrochages rapides du clinch. Le combat n’a jamais vraiment basculé dans l’irrationnel. C’est précisément ce que voulait le coin d’Imavov: un duel contenu, où le meilleur technicien sort en tête.

Cette victoire porte son bilan à 17-4-0 et verrouille sa place parmi les contenders du top moyen. Ce n’est pas un KO signature, mais c’est un pas de plus vers une place d’éliminatoire au titre. En termes de matchmaking, les options logiques ressemblent à un test contre un cogneur confirmé ou un puzzle de style du top 10: un vétéran capable d’imposer un combat sale, qui forcera Imavov à produire en clinch et à tenir cinq rounds au couteau. Le timing? Fin d’hiver ou début de printemps 2026, compte tenu des cycles d’entraînement et des plannings PPV européens.

La scène a ensuite appartenu à Benoît Saint Denis. Après sa défaite contre Dustin Poirier, le Bison avait besoin d’un message clair. Il l’a envoyé. Victoire par étranglement arrière à 2’56 du deuxième round contre Mauricio Ruffy, après une montée en intensité méthodique. On a vu le Saint Denis qu’on connaît: pression frontale, coups jetés pour ouvrir la lutte, puis enchaînement sur le dos. Surtout, on a vu des ajustements: moins de poursuite à vide, plus de patience pour installer la prise. Ça compte dans une catégorie où la moindre erreur coûte un soir entier.

Sportivement, ce succès lui rend son élan. Le Français réintègre le radar des adversaires classés, avec des scénarios immédiats: un top 10 mobile qui accepte la guerre, ou un grappler d’élite pour valider ses progrès au sol. Le type d’adversaire visé? Un profil capable de tenir un rythme élevé et de punir les entrées en lutte imprécises. Côté calendrier, une reprise au premier trimestre 2026 est plausible si la commission médicale ne prolonge pas et si l’équipe opte pour une préparation standard de 10 à 12 semaines. Objectif: un nom qui ouvre la porte d’un eliminator en année pleine.

La carte avait aussi ses histoires en amont. Oumar Sy s’est présenté face au Brésilien Brendson Ribeiro avec une mission simple: effacer un dernier revers mal digéré et réinstaller sa confiance en light-heavyweight. William Gomis, lui, retrouvait un style européen bien rodé avec le Polonais Robert Ruchala, typique du combattant complet qui mêle activity striking et enclenchements de lutte. Enfin, Axel Sola profitait de ses débuts UFC pour se tester contre l’Irlandais Rhys McKee, un longiligne à haut volume, dangereux quand le combat s’étire. Les résultats ont été contrastés, signe d’une marge de progression réelle mais aussi d’un niveau moyen relevé sur la scène mondiale.

Carton plein en diffusion, poussée locale et calendrier à venir

La soirée a été pensée pour être visible. RMC Sport, détenteur des droits en France, a déroulé un dispositif complet: préliminaires à partir de 18h en direct sur la chaîne Twitch de RMC Sport, grand format à 21h sur RMC Sport 1, puis ouverture au grand public avec les trois derniers combats diffusés en clair sur RMC Découverte. Stratégie simple: capter la communauté core d’entrée, puis élargir au plus grand nombre au moment des noms français. Pour un sport en pleine montée, c’est un levier évident d’audience et de notoriété.

Sur le terrain, Paris confirme son statut de base arrière du MMA en Europe. Depuis la légalisation en 2020, la région a vu fleurir les structures d’entraînement, avec un réseau de coaches qui s’est musclé en striking comme en grappling. La MMA Factory, entre autres, a servi de pépinière et de plateforme d’échanges internationaux, accueillant des partenaires venus du Brésil, du Caucase et d’Europe de l’Est. Résultat: les talents français arrivent mieux armés techniquement et mentalement, avec des camps qui savent gérer un pic de forme sur huit à dix semaines, calibrer le cutting et ajuster le plan A/B/C en fonction des adversaires.

Au-delà des victoires et des défaites, le week-end de Bercy a livré une photographie utile pour les matchmakers. Pour Imavov, l’étape suivante ressemble à un duel de validation contre un adversaire du top, dur à déloger et peu friand d’échanges à distance. Le but est clair: transformer une belle victoire en trajectoire vers un combat éliminatoire. Pour Saint Denis, l’urgence n’est pas au nom ronflant à tout prix, mais au bon style: quelqu’un qui teste son entrée en lutte, sa défense de guillotine et sa gestion de la fatigue sur trois rounds intenses. S’il passe ce cap, il rebasculera dans les conversations qui comptent chez les légers.

Que faire des trois autres tricolores? Pour Oumar Sy, la suite passe par un profil robuste mais accessible: un light-heavyweight expérimenté, solide en défense de takedown, qui l’oblige à travailler sa variété d’entrées et sa gestion de la cage. Pour William Gomis, l’idéal reste un striker-grappler hybride, histoire d’empiler des minutes de cage utiles et d’affiner les défenses sur les enclenchements le long de la clôture. Axel Sola, lui, gagnerait à enchaîner rapidement sur un striker de volume avec moins d’allonge que McKee, afin de mettre en valeur ses propres entrées et sa lecture des feintes. Dans les trois cas, un retour en 3 à 5 mois donne le bon tempo pour progresser sans brûler les étapes.

Calendrier, justement. La réussite des éditions précédentes à guichets fermés a installé Bercy comme rendez-vous récurrent. Une nouvelle date en 2026 est déjà dans les têtes, avec un format similaire: préliminaires ciblés sur les prospects locaux, têtes d’affiche françaises en haut de carte, et fenêtre de diffusion élargie pour capter le grand public. Côté rythme, la mécanique UFC est connue: bloc Europe au printemps et/ou à la fin de l’été, retours aux États-Unis pour les grosses affiches PPV, puis redistributions d’effectifs en fonction des bobos et des suspensions médicales. Attendez-vous à voir les Français rebookés entre un événement européen et une grosse carte nord-américaine, selon leur état de forme et les besoins de la grille.

Ce qui change surtout, c’est la profondeur. Il n’y a plus « un » nom français isolé, mais une grappe de profils complémentaires: un middleweight propre et méthodique, un lightweight pression avec finitions au sol, des plumes et mi-lourds qui apprennent vite. C’est dans cette densité que se jouent les prochaines marches: multiplier les rounds UFC, accumuler l’expérience des coins sous pression, apprendre à gagner moche quand il faut, et soigner la récupération pour revenir dans les bons créneaux.

Paris a fourni la scène, le public a donné le tempo, et les combattants ont apporté les réponses qu’on attendait d’eux. Imavov consolide sa place, Saint Denis réenchante la conversation, et les autres avancent à leur rythme. La suite n’est pas écrite, mais le chemin est tracé: des adversaires mieux classés, des styles plus piégeux, des semaines de camp plus fines. Si les cartes s’alignent, 2026 pourrait être l’année où un Français se rapproche vraiment d’un combat pour le titre, avec Bercy en toile de fond et un pays désormais accroché au rendez-vous.